Mobilité : la gare des Mureaux expérimente le nudge

NicolasThéodet

Lorsqu’on sait que 20% des problèmes d’exploitation de la SNCF en Ile-de-France intervient suite aux comportements de certains utilisateurs, quelle est la solution ? Et si c’était le nudge. Une méthode psychosociale qui vise à modifier le comportement des voyageurs sans contrainte. Pour cela, l’environnement joue un rôle primordial comme à la gare des Mureaux.

L’angle en extérieur de gare a totalement changé et est devenu un lieu de rencontre ludique. © CD78/ N.Theodet

Il y a un mois, le lieu était connu pour être un urinoir sauvage à proximité de la gare des Mureaux. Aujourd’hui, les enfants se chronomètrent sur une mini-piste d’athlétisme. Si la comparaison est délicate, elle est pourtant le fruit d’un travail regroupant la SNCF, Nicolas Fieulaine (chercheur en psychologie sociale) et Benoît De Fleurian (directeur practice creative nudge chez Ogilvy Consulting).

Ce travail a considérablement transformé la gare des Mureaux qui accueille la ligne J du transilien. Plusieurs endroits étaient connus de tous comme des endroits pour uriner. Deux se trouvaient dans le souterrain et un autre dans l’angle extérieur de la gare. Une habitude qui venait perturber le passage des  7 000 voyageurs quotidiens. Si bien que dans sa politique d’innovation engagée depuis trois ans, la SNCF a fait appel au nudge.

Nudge, faire le bon choix par soi-même

Le nudge, traduit en français par « coup de coude », a pour objectif d’inciter une personne à changer son comportement d’elle-même sans y être contraint. Dans ces zones de la gare des Mureaux ont été installés des pochoirs, des boules recouvertes de peinture hydrophobe et un espace ludique pour enfants.

Le ballon peint en peinture hydrophobe, et le dessin permet de dynamiser ce secteur de la gare. © CD78/ N.Theodet

Pour se réaproprier ces secteurs, il faut avant tout changer le rôle des lieux. Aux Mureaux, on a choisi le sport. Football, athlétisme et basket accompagnent dorénavant les voyageurs. Un patchwork coloré et artistique qui change totalement la perception des lieux. Pour cela, les spécialistes ont établi des décors selon quatre points précis.

« Il y a le contrôle social. Si les gens n’urinent pas là, je n’y vais pas non plus. Il faut aussi que le lieu raconte une histoire, ici le sport. On efface ensuite l’image des coins qui peuvent inciter à venir uriner, et pour finir, il faut que le lieu devienne actif, qu’il ne soit plus délaissé », expliquent Nicolas Fieulaine et Benoît De Fleurian.

Améliorer l’expérience de voyage en train

La gare des Mureaux a montré son efficacité et le projet pourrait être décuplé dans plusieurs gares de la région. © CD78/ N.Theodet

Ces infrastructures ont un coût de 90 000 euros pour la SNCF. Le projet s’est composé de plusieurs étapes. Après une observation précise et minutieuse de quatre semaines, une enquête de terrain et un constat sérieux établi par des capteurs, les chercheurs ont pu mettre à jour ces nudge. Après quatre semaines, le résultat est sans appel. Sur l’angle extérieur, plus personne n’a uriné, et sur l’ensemble de la gare, la diminution est de 88%.

Pour la SNCF, ce type de procédé est un véritable investissement. L’odeur d’urine qui baignait aux abords de la gare augmentait fortement l’aspect anxiogène des voyages en transilien. Supprimer cet aspect, c’est améliorer le confort des usagers. Selon l’enquête réalisée, ils sont 24% des utilisateurs quotidiens à percevoir l’expérience en gare positivement depuis l’installation des nudge. Ils sont 14% de plus, en seulement quelques semaines, à voir le lieu comme propre.