À Versailles se tiennent les championnats du monde de judo des sourds. Une compétition intense pour les athlètes et les organisateurs.
En tribune, les encouragements sont là. Pourtant, sur le tatami, les athlètes ne semblent pas perturbés. Ils regardent frénétiquement leurs entraîneurs qui multiplient les signes. Dans le gymnase Montbauron à Versailles, ce sont pourtant des combats à enjeux. Ceux pour devenir champion du monde sourd de judo.
« Cet handicap n’est pas une gêne pour la pratique. Il y a une notion d’équilibre, mais les athlètes la compensent facilement », confie Erik Mingasson, organisateur de l’événement.
En fait le réel problème, c’est la compréhension.
Damien Antoine, un champion du monde versaillais au service de son sport
Au total, 175 judokas de 26 pays se sont donnés rendez-vous. Sept catégories hommes, sept catégories femmes. Sans compter les compétitions par équipe qui se tiendront ce week-end. Une réelle fierté pour Damien Antoine, directeur technique national pour le développement du judo chez les sourds. Si aujourd’hui, il avance dans les allées en veste de costume bleu roi estampillée du Pin’s des Deaflympics (les JO des sourds), ce Versaillais était, il n’y a pas si longtemps présents sur les tatamis.
En 2004, il devenait champion du monde dans cette discipline. Auréolé de ce titre, il met aujourd’hui ses connaissances et son expérience pour développer la pratique de son sport.
« Avant 2004, il n’y avait pas grand-chose. Puis au fur et à mesure ça s’est développé. Aujourd’hui, il y a de nombreuses fédérations et de plus en plus d’athlètes. Nous pouvons réellement faire des catégories », explique-t-il.
Une communauté soudée et compétitive en judo
Dans les salles d’attentes d’avant les combats, de nombreux Iraniens, Russes, Ukrainiens. Sur le tatami numéro 2, l’ambiance est électrique entre un Turc et un Belge. En repêchage, l’issue du combat s’est déterminée dans les derniers instants par un ippon sur immobilisation de la part du judoka belge. Un combat qui se conclut dans le fair-play le plus total. « Les sourds ont une communauté extrêmement soudée. Ils aiment se retrouver », explique Patrick Lacombe, DTN adjoint chez France Judo. Cela se voit, dans la salle de test Covid où les athlètes se chambrent en langage des signes lorsqu’un ami passe le test, ou en salle d’échauffement où toutes les délégations se mélangent.
En réalité, la principale difficulté n’est pas pour les athlètes. Les arbitres doivent réussir à se faire comprendre.
« Il vont toucher plus souvent les athlètes pour leur indiquer un arrêt. Il y a aussi des signes qui permettent de comprendre une décision précise », explique le responsable de la fédération.
Mais surtout, ce sont les organisateurs qui semblent les plus éprouvés. Eux ne sont pas tous sourds, et doivent se démener pour que la compétition se déroule normalement. Ils sont faciles à reconnaître. « Je ne mets plus le masque, ils ont besoin de lire sur mes lèvres pour me comprendre », rigole Erik Mingasson qui devra courir encore jusqu’à dimanche et la fin de la compétition pour tout mener à bien.