Nous vous emmenons sur les traces d’Elsa Triolet et Louis Aragon à Saint-Arnoult-en-Yvelines. Littérature, poésie, art contemporain et grands espaces : n’attendez plus et réservez vos billets !
Cette année, nous célébrons les 50 ans de la disparition d’Elsa Triolet. Tout le monde connaît son mari, le poète et écrivain Louis Aragon. Elsa Triolet a souvent été cantonnée au rôle de muse. Elle représentait l’éternel féminin qui n’existait que sous la plume de l’homme. Elsa Triolet est pourtant à la tête d’une œuvre littéraire importante et c’est ce que la Maison Triolet-Aragon tente de remettre sur le devant de la scène, notamment au travers de visites guidées aussi fascinantes qu’intelligentes.
Le moulin de Villeneuve abrite la maison du couple, au milieu du parc de 5 hectares, les visiteurs entrent dans l’intimité d’Elsa Triolet et Aragon : une visite aussi émouvante qu’agréable au milieu d’œuvres d’art contemporain.
En 1970, Elsa Triolet meurt. Aragon lui survivra douze années durant lesquelles il n’aura plus à cœur d’aller dans cette maison chargée de souvenirs. Elle reste donc intacte pour qui la visite aujourd’hui. La maison semble encore habitée par le couple, comme s’ils allaient revenir d’une promenade. La cuisine possède encore le frigidaire (qui fonctionne !), les fauteuils en rotin sont également intacts dans le salon entre les oeuvres de Picasso, offertes par l’artiste.
Dans toute la maison, des œuvres prestigieuses ornent les murs, comme une céramique de Fernand Léger, que ce dernier a offert à Elsa Triolet à la sortie d’un de ses livres.
Une maison-témoin du temps qui a passé
Plus de 30 000 livres sont rangés au fil des pièces. On peut totalement visiter la Maison sans rien connaître de l’œuvre de Triolet ou d’Aragon, cette visite peut, au contraire, se voir comme une porte d’entrée. Chaque petit objet a une histoire et permet de se rapprocher des deux écrivains. Dans cette maison, toutes les périodes de leur vie sont illustrées. C’est une habitation de la vie quotidienne, tout simplement.
Erik Orsenna, Président de la Maison Triolet-Aragon, rend à Elsa Triolet sa place d’autrice qui n’aurait jamais dû exister dans l’ombre d’un autre. L’écrivain évoque les célèbres conférences de Virginia Woolf « Une chambre à soi », qui met en avant la nécessité pour les femmes de ne jamais se perdre, même dans l’amour d’un autre.
Quand on est célébré, on est emprisonné
Erik Orsenna avoue, comme beaucoup, n’avoir lu Elsa Triolet que par le prisme d’Aragon. Aujourd’hui il a totalement redécouvert l’œuvre et lit les deux « en chambre séparée ».
La maison est décorée des œuvres des amis du couple. Ils mettaient un point d’honneur à exposer les œuvres contemporaines que leurs proches réalisaient. C’est aussi pour cette raison que la Maison Triolet-Aragon accueille aujourd’hui de nombreux artistes contemporains, notamment dans les jardins : être précurseur et permettre de poser un regard nouveau. La visite de la Maison et du jardin permet un voyage dans le passé et le présent grâce à une programmation artistique pointue. Lorsqu’Aragon a fait don de la maison à l’État, cela faisait partie de ses conditions : laisser l’art contemporain s’immiscer dans cet espace, qu’il continue à vivre à travers les époques. Un bal parquet fait également partie du paysage. En mars 2019, ce dernier avait d’ailleurs été victime des intempéries.
Elsa Triolet a commencé à écrire en russe, sa langue natale. Elle se mettra ensuite au français, ce qui sera une large réussite puisqu’elle est la première femme à recevoir le prix Goncourt pour «Le Premier Accroc coûte deux cents francs». Elle traduit beaucoup d’auteurs russes, parmi lesquels Anton Tchekov et a donc participé à leurs succès en France. Elsa Triolet était une femme de lettres importante. Réelle source d’inspiration, Elsa Triolet a également été immortalisée par la célèbre cinéaste Agnès Varda dans son court-métrage « Elsa la Rose ».
En s’installant à Saint-Arnoult-en-Yvelines, Elsa Triolet prend grand soin du jardin qui lui plaît beaucoup, comme elle l’explique à sa sœur dans ses nombreuses lettres hebdomadaires. Elle installera d’ailleurs son bureau dans une pièce qui offre une jolie vue verdoyante. C’est elle qui choisit également l’emplacement du tombeau dans lequel le couple repose. Il est assez rare de pouvoir être enterré dans sa demeure. À la mort d’Elsa, Aragon (pourtant communiste), demande au Président Georges Pompidou cette faveur pour qu’Elsa puisse reposer là où elle s’est toujours sentie chez elle. « Les deux êtres entre les deux hêtres » : un tronc coupé en deux relié par les racines, une place de choix où Aragon viendra la rejoindre 12 ans plus tard.