Le 30 novembre 1921, Henri-Désiré Landru est condamné à mort puis guillotiné à Versailles le 25 février 1922. Sans jamais avoir avoué. Celui que la presse française et internationale de l’époque a surnommé le « Barbe-Bleue de Gambais » est devenu une célébrité du crime sordide.
« 6h10. Temps clair ».
Le bourreau Anatole Deibler inscrit ces quelques mots dans son carnet, à l’aube du 25 février 1922. Ce matin-là, il y a juste 100 ans, Honoré Landru, alias le Barbe Bleue de Gambais et de Vernouillet est guillotiné à Versailles.
Disparitions mystérieuses
Tout commence en 1914, quand Landru, déjà condamné pour escroquerie, loue une villa à Vernouillet. Là, il invite des femmes, veuves ou divorcées, rencontrées par petites annonces matrimoniales sous divers pseudonymes, celui de Monsieur Fremyet notamment.
On ne reverra plus 4 d’entre elles.
Il doit abandonner rapidement Vernouillet après un banal contrôle dans le train : porteur d’un billet périmé, il avait été obligé de produire des papiers mentionnant l’adresse de Vernouillet. Craignant que la police ne s’y présente, il abandonne les lieux en août 1915.
Ensuite, il s’installe dans une villa isolée de Gambais. Là encore, 7 femmes disparaissent sans laisser de trace…
A l’époque, c’est un certain inspecteur Jules Belin, alerté par les familles inquiètes de ne plus avoir de nouvelles, qui va se saisir de l’enquête. Difficile car aucun indice explique les 11 disparitions de Seine-et-Oise (les Yvelines aujourd’hui).
Le carnet des horreurs
L’inspecteur Belin ne lâche rien mais son enquête piétine. Jusqu’à la découverte d’un carnet macabre dans lequel Landru a tout noté : les rencontres avec les victimes, ses déplacements en Seine-et-Oise jusqu’à un détail atroce qui fera basculer l’affaire. Belin découvre avec horreur dans ce calepin toutes les dépenses faites… pour l’achat de plusieurs scies à métaux !
Les noms des fiancées sont également notés au gré des pages et y sont associés à des heures qui paraissent, pour les enquêteurs, constituer les heures des crimes : « 12 avril 1917 Mlle Babelay 4 h soir ; 1er septembre 1917 Mme Buisson 10 h 15 ; 26 novembre 1917 Mme Jaume 5 h ; 5 avril 1918 Mme Pascal 17 h 15 »…
L’un des éléments les plus accablants est fourni par des reçus de billets de train : Landru achetait, lors de ses déplacements en train à Vernouillet ou Gambais, un aller-retour (pour lui) et un aller simple (pour la fiancée).
Détails sordides, auxquels s’ajoute la découverte d’ossements dans la cuisinière… il n’en fallut pas plus à l’inspecteur pour comprendre les crimes abominables du Barbe-Bleue de Gambais.
Un procès très médiatisé
Le procès-fleuve a passionné les contemporains. Il a débuté le 7 novembre 1921 devant la cour d’assises de Seine-et-Oise siégeant à Versailles.
Le procès à grand spectacle attire le Tout-Paris : Mistinguett, Raimu, Berthe Bovy ou même Colette qui est alors chroniqueuse judiciaire ! Ce procès attire la presse internationale qui n’en revient pas de l’ambiance de ce procès hors norme et de l’accusé qui fait assaut d’humour. « Un tueur en série lui ? On n’ose y croire. C’est un monsieur « tout le monde » plein de drôlerie » écriront certains journalistes judiciaires.
La cuisinière dans laquelle Landru était supposé avoir fait brûler les corps de ses victimes est même transportée dans la salle d’audience.
Face à une série de témoignages accablants et un faisceau de présomptions convaincantes, son avocat, Maître Vincent Moro-Giafferi, ne peut lui éviter d’être condamné à mort : au terme de huit heures de délibérations, les jurés déclarent Henri Désiré Landru coupable de onze meurtres et le condamnent à la guillotine le 30 novembre 1921.
Le président de la République Alexandre Millerand rejette le 24 février 1922 le recours en grâce déposé. Landru est exécuté le 25 février 1922 au petit matin et est enterré dans la partie réservée aux condamnés à mort du cimetière des Gonards à Versailles.
Les Archives des Yvelines ont tout numérisé
Les Archives départementales des Yvelines ont trié, dépollué puis numérisé et mis en ligne chaque rapport de cette enquête. Une source documentaire riche de milliers de pages, de journaux d’époque, de comptes rendus d’interrogatoires, de plaidoiries, de photos… Jusqu’au verdict final : la guillotine. Cela se dévore comme un thriller.