À Maule, son restaurant propose des plats savoureux aux senteurs créoles. Portrait de « Babette », chef renommée qui ravit les papilles yvelinoises par son art et son tempérament.
La générosité. S’il fallait « résumer » Babette de Rozières en un seul mot, c’est celui que l’on retiendrait : Babette est généreuse en tout. Elle est généreuse de son verbe, généreuse de ses rires, généreuse aussi de ses passions, à commencer par la cuisine qu’elle combine avec l’amour de cet outremer qui l’a toujours inspirée : « Ma cuisine est une cuisine gourmande… comme moi ! », avoue-t-elle avec malice.
« Les épices, c’est toute une culture ! »
Babette, c’est une cascade qui surgit et roule jusqu’à vous pour vous envoûter par sa cuisine et les pincées d’épices dont elle aromatise des plats aux noms délicieusement exotiques : cuisse de poulet boucanée et sa sauce créole épicée appelée « sauce chien », sauté de bœuf gourmand à la créole mariné et mijoté aux graines à roussir, dos de morue aux épices et sa crème safranée mijotée au curry vert…
Les épices, c’est une culture, celle que ma grand-mère, qui était un peu herboriste, m’a fait découvrir en Guadeloupe quand j’étais enfant. J’ai appris à cuisiner par le nez, en respirant les senteurs de mon île. Les choses sans saveurs, ça ne m’intéresse pas !
Babette, ce n’est pas seulement un chef, c’est la promesse d’un ailleurs. Et comme elle est généreuse, elle est venue déposer cet ailleurs à nos pieds, à Maule.
« Le foyer des rencontres heureuses et chatoyantes »
Comment y est-elle arrivée ? « C’est une longue histoire ! » qui commence aux Antilles, se poursuit à Paris, passe par Saint-Tropez avant d’aboutir dans les Yvelines. C’est l’histoire d’Elise, d’Elisabeth et de Babette : les trois prénoms qui rythment les trois temps de sa vie, de sa valse. En Guadeloupe, Élise eut une enfance douloureuse, dont Elisabeth referme le chapitre en débarquant à Paris à la fin des années 1960, sans un sou. Étudiante en histoire, elle passe alors les concours de l’ORTF, devient scripte pour les émissions de Maritie et Gilbert Carpentier. « J’y ai rencontré les plus grands artistes. Je me sou- viens de Montand fredonnant pour moi Les Roses de Picardie… » Le soir, elle est standardiste au Grand Hôtel, pour arrondir les fins de mois. « C’est là que tout a commencé : je descendais en cuisine pour aller dîner. Cela m’a plu… et ne m’a jamais quittée ! »
Babette entre en scène. Elle fait ses armes dans une toute petite affaire (« deux tables, en face des Folies-Bergère ») ; tente l’aventure à Saint-Tropez où elle ouvre la Plage des Palmiers ; retourne en Guadeloupe pour y créer quatre restaurants ; revient à Paris ouvrir La Villa créole à Paris, et la Table de Babette à Poissy, en 1993. Entre-temps, elle écrit plusieurs livres et s’impose à la télévision : elle y fait découvrir aux Français la cuisine qu’elle aime, la cuisine créole.
À Maule, elle a créé La Case de Babette, un restaurant niché dans l’ancienne grange de sa maison tricentenaire. À sa table, elle a reçu les plus grands de la politique et de la culture. Dans leurs dédicaces, tous célèbrent le restaurant de Babette comme « le foyer des rencontres heureuses et chatoyantes » (dixit l’académicien Jacques Laurent). Babette est une fête !
propos recueillis par Fabrice Madouas.